samedi 6 août 2016

Œuvre de la saison 2015-2016


Le Jeune homme et la mort
Roland Petit
Teatro Massimo di Palermo
15-19 juin  2016


Le meilleur souvenir de la saison n'est pas à l’Opéra de Paris mais parisien tout de même, par son histoire, son cadre et ses danseurs, Eleonora Abbagnato et Stéphane Bullion. Les deux étoiles parisiennes, invitées une semaine en juin à l'opéra de Palerme pour une soirée en hommage à Roland Petit ont fait honneur au chorégraphe français et à son œuvre la plus emblématique.


Chef d’œuvre intemporel de Jean Cocteau et de Roland Petit, Le jeune homme et la mort, quinze minutes de danse virtuose, mais surtout de théâtralité expressionniste et d’émotions variées, déroule son drame sur une musique inspirée, la Passacaille de Jean-Sébastien Bach. L'opéra de Palerme avait donc transformé la grande scène du magnifique Teatro Massimo en atelier parisien, et mis son orchestre à la disposition du mimodrame existentialiste.



Eleonora Abbagnato et Stéphane Bullion, deux des derniers danseurs favoris de Roland Petit ont transporté le public avec maestria au cœur de cette histoire tragique.
Eleonora Abbagnato figure hiératique du destin, module avec saccade son intraitable dessein avec hauteur et mépris, ruse et violence. Elle est la mort faite femme, insidieux sujet et emblème de l’amour déçu d’un jeune homme devenu son jouet, sa proie et sa victime. Il y a chez elle, cette maîtrise du geste et des expressions qui en deviennent presque naturels malgré la grande théâtralité du propos.


A ses côtés, Stéphane Bullion continue d'explorer le rôle avec profondeur. Il déploie une infinité d’émotions avec poésie et justesse. Son Jeune homme sentimental est de chair et de fragilité. Il fait vivre son personnage au rythme de sa propre respiration. Son personnage évolue dans le monde du doute, de la peur à l’effroi, de la tristesse à l'espoir, de la sensualité à la violence du désespoir. Une narration en soi, pleine de nuances et de sincérité dont l'intensité fait office de fil directeur. Dans une révolte contre lui-même, entre abandon sensuel, jouissance sexuelle, fébrilité du doute et violence des sentiments, le désespoir l’emporte. La figure dramatique de la mort victorieuse clôt le ballet dans la poésie, avec la marche saisissante des deux protagonistes sur les toits éclairés d'une nuit de pleine lune parisienne.
Des interprètes exceptionnels pour un ballet parfait.



Le jeune homme et la mort
Chorégraphie - Roland Petit (1946)
Livret - Jean Cocteau
Musique - Jean Sébastien Bach Passacaille en do mineur BWV 582
Décors - Georges Wakhevitch
Costumes - Karinska et Christian Bérard
Orchestre du Teatro Massimo di Palermo
Direction - Alessandro Ferrari